Évaluation des effets de l’exposition aux contaminants émergents dans les rejets d’eaux usées sur des organismes aquatiques
Chris Metcalfe, professeur et directeur, Institut de la science des bassins versants, Université Trent, 2010 - 2013
Enjeu
Une catégorie de composés qui ont des effets nuisibles potentiels et dont la présence dans les effluents des usines de traitement des eaux municipales n’était auparavant pas connue est de plus en plus l’objet d’études. Au nombre de ces composés, regroupés sous l’appellation « contaminants nouvellement préoccupants », on compte des substances telles que les perturbateurs endocriniens, les produits pharmaceutiques et de soins personnels, et les nanomatériaux. L’incidence de ces composés sur les écosystèmes et, finalement, sur la santé humaine demeure inconnue et il existe peu d’outils d’utilisation simple et rapide, et assez sensibles pour détecter les effets biologiques de ces contaminants à l’état de trace. En outre, le rythme de retour aux conditions de référence une fois que l’exposition a cessé est également inconnu.
Le projet, sous la direction de Chris Metcalfe, Ph. D., vise les objectifs suivants :
- Concevoir des techniques simples, rapides et sensibles d’évaluation des effets écologiques de ces contaminants dans les eaux réceptrices;
- Contribuer aux travaux de recherche sur les effets écologiques de ces contaminants, de manière à guider les politiques et la règlementation aux fins de réduire les effets des eaux usées municipales sur les écosystèmes aquatiques;
- Promouvoir le dialogue entre chercheurs et utilisateurs dans le but de caractériser les risques de l’exposition aux contaminants émergents par rapport à d’autres substances présentes dans les eaux usées municipales.
Projet
Pour évaluer les impacts écologiques des « contaminants nouvellement préoccupants » dans les eaux réceptrices, l’équipe de projet a surveillé et évalué les effets biologiques chez des espèces aquatiques de référence (à savoir les poissons et moules d’eau douce) présentes en aval des usines de traitement des eaux usées dans trois bassins versants (rivière Grand, en Ontario; fleuve Saint-Laurent, au Québec; rivière Saskatchewan-Nord, en Alberta) et dans le lac 360 dans la région des lacs expérimentaux (RLA), en Ontario.
À ce jour, le projet a permis de recenser plusieurs biomarqueurs dans les moules et poissons d’eau douce (à savoir un affaiblissement de la fonction immunitaire) qui peuvent servir d’indicateurs de l’exposition à des « contaminants nouvellement préoccupants » dans les eaux usées municipales. De plus, selon les résultats préliminaires du projet, deux espèces de dards exposées aux rejets d’eaux usées municipales dans la rivière Grand sont fortement sujettes à des perturbations endocriniennes. Le système endocrinien peut être perturbé lorsque des produits chimiques imitent des hormones naturelles. Par exemple, l’imitation de l’œstrogène peut activer des gènes responsables de la production des protéines d’œuf chez des poissons mâles. Enfin, les études réalisées dans le lac 360 (RLA) démontrent que les effets de perturbation endocrinienne et sur les niveaux de population de poissons de l’exposition à des doses d’éthinylestradiol (une forme synthétique d’œstrogène utilisée dans divers contraceptifs hormonaux) s’estompaient au cours des deux années suivant la fin de l’exposition. Selon ces derniers résultats, les efforts de réduction des concentrations d’œstrogène dans les eaux usées devraient normalement entraîner une diminution des effets biologiques chez les organismes aquatiques exposés.
Produits
- L’équipe du projet conçoit actuellement des documents électroniques et imprimés qui seront diffusés aux utilisateurs pour les orienter quant à la surveillance des effets chez les organismes en aval des rejets d’eaux usées provenant des usines de traitement.
- Les chercheurs ont organisé un atelier pour présenter les résultats du projet dans le cadre de la réunion conjointe de l’Association canadienne sur la qualité de l’eau et l’Association canadienne des eaux potables et usées, en mars 2013 à Hamilton (Ontario). Bon nombre de personnes y ont participé et il y a eu une discussion animée sur l’importance des résultats de l’étude pour la prise de décisions par les municipalités.
- Le ministère de l’Environnement de l’Ontario a demandé à l’équipe d’utiliser les techniques élaborées dans le cadre de ce projet pour évaluer les répercussions sur la rivière Grand d’une mise à niveau prévue de l’usine de traitement des eaux usées dans la région.
- Le projet a donné lieu à la publication d’articles scientifiques :
- Tetreault et coll. « Intersex and reproductive impairment of wild fish exposed to multiple municipal wastewater discharges », Aquatic Toxicology, vol. 104 (2011), p.278-290.
- Gillis et coll. « The impact of municipal wastewater effluents on field-deployed freshwater mussels in the Grand River (ON) », Environ. Toxicol. Chem., (2013). Accepté.
- L’équipe du projet a contribué à l’atelier du RCE sur les contaminants émergents qui a eu lieu à Québec (Québec)
Exposés et affiches présentés lors de plusieurs conférences : SETAC Europe, 2013; SETAC Europe 2012; ASLO, 2013; CCRP, 2013; atelier annuel du CCEC, 2012; Conférence de l’ACQE, Burlington, 2012; SETAC Globe, Berlin, 2012; SETAC North America, Boston, 2011; American Water Research Association Conference on Contaminants of Emerging Concern, Denver, 2012.
Résultats
- Changements anticipés dans les pratiques des municipalités liés à la surveillance des eaux en aval des usines de traitement des eaux usées UTEA).
- Meilleures connaissances des effets sur les organismes en aval des UTEA.
- Politiques et règlementation avisées ciblant la réduction des impacts des eaux usées municipales sur les écosystèmes aquatiques.
- Promotion de la communication entre chercheurs et utilisateurs en vue de caractériser les risques d’exposition aux contaminants émergents par rapport à d’autres éléments présents dans les eaux usées municipales.