Au Canada, nous avons le privilège de pouvoir compter sur des chefs de file du secteur de l’eau municipale issus de divers milieux et qui servent les collectivités de l’ensemble du pays. Au Réseau canadien de l’eau (RCE), nous mettons en lumière ces personnes exceptionnelles. Notre objectif est de célébrer et d’élever leurs contributions en créant des profils qui mettent en valeur leurs parcours professionnels et leurs points de vue sur les tendances de l’industrie. Pour notre deuxième chef de file du secteur de l’eau, nous vous présentons Gen Nielsen, directrice des installations et des services de traitement de l’eau à la Ville d’Ottawa. Poursuivez votre lecture pour découvrir son parcours dans l’industrie de l’eau et son point de vue sur les tendances émergentes.
Pouvez-vous décrire ce qui vous a amené à choisir une carrière dans le secteur de l’eau municipale ? À quoi ressemble votre parcours professionnel depuis que vous avez rejoint l’industrie ? Qu’est-ce qui vous plaît le plus dans votre travail ?
J’ai choisi de faire carrière dans l’industrie de l’eau. Au lycée, j’excellais en mathématiques et en sciences, ce qui m’a amené à m’orienter vers l’ingénierie. Parmi les différentes branches, c’est le génie civil qui m’a semblé le plus intéressant. Mon premier emploi dans le cadre d’un programme coopératif portait sur la modélisation hydrologique, et j’ai développé cette expérience au fil du temps. Chaque emploi ultérieur a été un peu différent du précédent, mais chacun s’est appuyé sur les compétences et les connaissances que j’ai acquises en cours de route. Aujourd’hui, je travaille dans le domaine de l’exploitation des installations municipales de traitement de l’eau et des eaux usées.
Quelles sont les compétences les plus importantes pour une carrière réussie dans la gestion municipale de l’eau ?
Les compétences les plus importantes pour une carrière réussie dans la gestion de l’eau municipale sont les suivantes :
Curiosité et volonté d’apprendre : En général, lorsque vous travaillez dans un environnement municipal, vous ne disposez que d’une petite partie d’un gâteau beaucoup plus grand. Vous devez comprendre ce que sont tous ces morceaux et comment ils fonctionnent ensemble. La ville d’Ottawa compte un million d’habitants et la municipalité elle-même est composée de plus de 17 000 employés. Ce n’est pas un travail que vous ferez seul, vous devez donc trouver comment collaborer avec les autres pour faire avancer les choses. Pour cela, il faut notamment comprendre d’où ils viennent et quels sont les défis et les contraintes auxquels ils sont confrontés.
Connaissances en matière de réglementation et de sécurité : Dans l’industrie de l’eau, il est primordial de comprendre les exigences en matière de réglementation et de sécurité. En tant que gestionnaire et dirigeant, il est essentiel de donner le ton d’une solide culture de la conformité, de la santé et de la sécurité, et de la qualité. Je pense que le public attend implicitement de nous que nous fassions du bon travail en matière de protection de l’environnement, de sécurité de l’eau et de santé et de sécurité des employés.
Gestion des infrastructures : Les systèmes de distribution d’eau et de traitement des eaux usées reposent sur des infrastructures, mais ce sont les personnes qui les gèrent et les exploitent. Il est essentiel de comprendre leurs besoins, de leur fournir les outils nécessaires et de les soutenir dans leur rôle, en particulier dans les postes de direction.
Sensibilisation à l’organisation : Il est important d’être au courant de ce qui se passe au sein de la ville, tant sur le plan administratif que politique. Cette connaissance vous aide à promouvoir efficacement les priorités de votre équipe. Par exemple, la compréhension des défis financiers liés au nouveau système de transport en commun d’Ottawa peut avoir un impact sur le budget global de la ville, y compris sur les services d’eau et d’assainissement.
En repensant à votre carrière dans l’industrie de l’eau, quel est le changement positif que vous avez observé et/ou vécu ?
L’un des changements les plus fascinants que j’ai observés au cours de ma carrière dans l’industrie de l’eau est la prise de conscience croissante des aspects sociaux de l’infrastructure et de l’ingénierie. Lorsque j’ai fait mes études d’ingénieur, l’accent était mis principalement sur l’aspect technique – calcul, chimie, physique et un cours de base sur l’éthique de l’ingénierie. Il y avait peu de discussions sur l’impact des infrastructures sur la vie des gens, sur la communauté ou sur les implications des décisions d’ingénierie en termes d’équité.
Au fil du temps, j’ai constaté une évolution vers la reconnaissance du rôle important que jouent les infrastructures dans les communautés. Les choix des ingénieurs peuvent avoir de profondes répercussions, et l’on s’attache désormais davantage à comprendre ces effets. Par exemple, j’ai lu des articles sur les infrastructures de transport et sur la façon dont les autoroutes ont historiquement traversé et endommagé les communautés, en particulier aux États-Unis. Ces autoroutes traversaient souvent des quartiers racisés ou à faibles revenus, qui n’avaient pas le pouvoir de s’opposer à de tels projets, ce qui a conduit à la destruction de la cohésion communautaire au profit d’individus plus riches qui pouvaient se permettre de conduire.
Il est intéressant de noter qu’il existe aujourd’hui aux États-Unis des programmes fédéraux visant à rétablir les liens entre ces communautés divisées, ce qui constitue une étape positive. Cette prise de conscience va au-delà des transports et s’étend à des domaines tels que la gestion des eaux pluviales et les structures tarifaires des services d’eau et d’assainissement. Il est encourageant de voir cet aspect gagner en attention et en espace.
En tant qu’ingénieurs, notre travail ne consiste pas seulement à construire des infrastructures, mais aussi à soutenir et à améliorer les communautés. La prise en compte de l’intersection entre les personnes et les infrastructures ajoute une couche de richesse et de complexité à notre travail, ce qui le rend encore plus gratifiant.
Quelles sont les trois tendances émergentes dans le secteur de l’eau que les gestionnaires de l’eau devraient surveiller ?
L’un des problèmes les plus urgents est celui des contaminants émergents, qui ont des répercussions importantes sur l’homme et l’environnement. Du côté des installations, la modification des processus de traitement de l’eau et des eaux usées pour traiter ces contaminants peut avoir des implications financières considérables. Ce défi s’accompagne d’exigences réglementaires qui ne manqueront pas d’arriver. Il est également essentiel de surveiller la manière dont ces contaminants sont contrôlés. Par exemple, la stratégie pourrait impliquer un contrôle à la source ou un traitement en bout de chaîne. Les réglementations fédérales peuvent empêcher ces contaminants de pénétrer dans le cycle de l’eau ou les laisser entrer, ce qui nous oblige à les éliminer par la suite. Il est essentiel de comprendre et d’anticiper les stratégies de gestion de ces contaminants.
Un autre élément est la gestion des infrastructures, en particulier l’équilibre entre les besoins de croissance. La demande de logements est importante dans tout le pays, et le développement immobilier est impossible sans services adéquats d’approvisionnement en eau et de traitement des eaux usées. Il ne s’agit pas seulement des canalisations, mais aussi des stations d’épuration. Il est essentiel de planifier correctement les expansions : il ne faut pas construire trop tôt et avoir une capacité sous-utilisée, et il ne faut pas non plus se permettre de construire trop tard et d’être confronté à des pénuries de capacité. En outre, il est essentiel de trouver un équilibre entre ces besoins de croissance et le renouvellement des infrastructures vieillissantes. Tout cela doit être géré en tenant compte des contraintes opérationnelles et financières. Cet exercice d’équilibre est un défi fascinant et vital dans le secteur de l’eau, qui nécessite une attention et une influence particulières.
L’autre grand sujet qui me préoccupe est la durabilité des ressources humaines. Nous sommes à un tournant où de nombreux professionnels de longue date du secteur partent à la retraite, et avec eux, des connaissances précieuses partent parfois aussi. Ce problème se pose à tous les niveaux de l’organisation, depuis les ingénieurs et les hommes de métier jusqu’aux cadres supérieurs et aux gestionnaires. Il est essentiel de disposer d’un nombre suffisant de personnes fortes, compétentes et expérimentées à tous les niveaux de l’organisation pour maintenir les opérations d’infrastructure.
L’infrastructure elle-même n’est qu’une partie de l’équation ; il faut des personnes qualifiées pour la gérer et l’exploiter efficacement. Il est donc essentiel de disposer d’un nombre suffisant de personnes qualifiées. En outre, l’équilibre entre la vie professionnelle et la vie privée fait l’objet d’une prise de conscience croissante. Nous constatons un partage accru des tâches parentales entre les hommes et les femmes, ce qui signifie que chaque personne sur le lieu de travail a probablement des obligations familiales, qu’il s’agisse d’enfants, de parents, d’un conjoint ou de problèmes de santé personnels.
Il est essentiel de prendre soin de l’ensemble de la personne et de veiller à ce que notre environnement de travail favorise le bien-être de chacun. Cela implique d’être raisonnable dans nos attentes et de ne pas surcharger les employés. En favorisant un environnement de travail sain et positif, nous pouvons conserver une main-d’œuvre solide et dévouée.